Une réforme des prêts bonifiés qui doit être défendue par l’ensemble des syndicats

En septembre, le ministère de l’Agriculture a annoncé une réforme des prêts bonifiés. A Jeunes Agriculteurs, nous attendions cette annonce depuis longtemps déjà. Si je me satisfais que l’administration se soit appuyée sur nos propositions pour construire la nouvelle mesure, je m’étonne que d’autres syndicats soient vent debout contre l’évolution du dispositif, alors même que nous devrions avancer ensemble pour assurer le renouvellement des générations d’agriculteurs.

Le système classique des prêts dits « bonifiés » permettait à un jeune agriculteur d’accéder à des prêts à taux préférentiel par rapport aux taux du marché : 1% en zones de montagne, en zone défavorisée et dans les DOM et 2,5% en zone de plaine. Face à la baisse des taux d’intérêt du marché, il est apparu que ce dispositif n’était plus attractif, qu’il devait donc évoluer.

C’est pourquoi, en concertation avec le ministère, nous avons proposé de basculer l’enveloppe des prêts bonifiés sur une nouvelle modulation de la Dotation jeune agriculteur (DJA), basée sur le coût de reprise et l’effort d’investissement prévus dans le plan d’entreprise. Le porteur de projet pourrait ainsi bénéficier de 4 000 € minimum en zone de plaine ou 8 000 € minimum en zones défavorisée ou de montagne, si son plan d’entreprise démontre un coût de reprise et modernisation supérieur à 100 000 €.

La Coordination rurale et la Confédération paysanne ont remis en cause ces évolutions dans des communiqués de presse publiés en septembre et en octobre. La Coordination rurale a annoncé qu’elle préférait une aide directe à la trésorerie. La Confédération paysanne a, quant à elle, dénoncé le seuil de 100 000 euros de coût de reprise et de modernisation, nécessaire pour obtenir cette nouvelle modulation.

J’ai du mal à comprendre ce dénigrement du financement d’outils de modernisation, alors même qu’investir, créer de nouveaux projets sur l’exploitation reprise est une nécessité pour créer de la valeur ajoutée. N’est-ce pas se voiler la face que de penser qu’une majorité d’agriculteurs reprend une entreprise de moins de 100 000 euros ? N’est-ce pas oublier que les agriculteurs ayant peu de coût de reprise ou d’investissements peuvent tout de même bénéficier de la DJA de base et des autres modulations existantes aux échelles nationales ou régionales ? N’est-ce pas tout simplement s’opposer à une proposition qui vient d’un autre syndicat, sans réfléchir à l’intérêt pour les futurs installés ?

Le dispositif public d’aide à l’installation, pour être pertinent et légitime, doit pouvoir s’adapter à tous les projets, qui sont de plus en plus divers. Certaines installations impliquent plus de coûts que d’autres, c’est un fait, c’était déjà le cas avant cette réforme. Mais les prêts bonifiés ne permettaient plus de les accompagner correctement. Le nouveau dispositif n’incite en rien au surinvestissement, il suit les besoins des porteurs de projet. Ceux qui n’en ont pas besoin n’utiliseront pas la nouvelle modulation, tout simplement . Supposer que certains agriculteurs seraient poussés à investir inutilement juste pour toucher une aide qui ne couvrira jamais qu’une ‎part du besoin est leur faire un mauvais procès.

Oui, Jeunes Agriculteurs milite pour cette nouvelle modulation. Au lieu de remettre en cause cette proposition, il nous paraît plus intéressant de se battre ensemble pour que les conseils régionaux et Draaf, qui ont désormais la main, ne décident pas de mettre des montants trop faibles sur cette modulation alors que l’objectif est de permettre à un maximum de nouveaux installés d’obtenir les mêmes montants que pour les prêts bonifiés.

Nous attendons désormais la réponse de la Commission européenne pour que les travaux puissent commencer dans chacune des régions françaises. En effet, charge à elles d’établir leur grille sur cette modulation : définir les montants attribués en fonction du montant de reprise et de modernisation. Les régions auront un an pour mettre en place ce nouveau dispositif et faire valider leur grille auprès de la Commission européenne. Nous savons que certaines sont réticentes à ce projet, et souhaitent attendre la prochaine PAC pour engager le travail. Nous ne doutons pas qu’elles changeront d’avis lorsqu’elles percevront l’intérêt réel pour les jeunes installés.

Au-delà des clivages idéologiques et des intérêts particuliers, nous devons tous, main dans la main, penser à l’avenir. Nous devons tous œuvrer pour que des femmes et des hommes soient toujours plus nombreux à s’installer.


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