Une cave particulière et des chèvres pour alliées

Thomas Chaullier est en passe d’accomplir son rêve : ouvrir une cave particulière en AOP palette. Il met ses chèvres à contribution pour lutter contre l’érosion des sols.

Au pied de la montagne Sainte-Victoire, les raisins de Thomas Chaullier sont presque mûrs et les sangliers ne s’y trompent pas. « Ils mangent les baies », raconte le jeune homme de 25 ans en désignant les grappes dégarnies. Du grenache noir, sucré à souhait. « C’est arrivé il y a trois semaines, ils étaient une dizaine.» Depuis, il a grillagé le pourtour de la parcelle si convoitée: 2,8 ha de vignes en AOP palette. «La plus petite appellation provençale», précise Thomas. Situé sur les hauteurs de Meyreuil, près d’Aix-en-Provence, ce terrain servait auparavant de pâture aux chèvres de sa mère. «Je me suis dit qu’on pouvait le valoriser», raconte le viticulteur installé en avril 2014. Il a donc planté six cépages – grenache blanc, bourboulenc, clairette, grenache noir, syrah et mourvèdre – qu’il apprend à vinifier avec le temps. Une production qu’il vend pour l’instant à un négociant. «L’AOP palette ne cherche pas à se développer, c’est un peu du chacun pour soi, constate Thomas. Ainsi, un jeune agriculteur n’a pas d’aide ni de droits gratuits à la plantation.» Tout le contraire de l’AOP côtes-de-Provence qu’il cultive sur 7,9ha pour une cave coopérative.

«C’est super intéressant parce qu’on travaille tous ensemble. Quand il y a un pépin, tout le monde l’assume. Quand il y a une réussite, tout le monde en profite.» Les viticulteurs les plus expérimentés lui ont appris à identifier les carences et à tailler différemment selon le cépage. «Tout ce que j’ai appris, je l’applique sur le palette.»

 Ses projets ? S’agrandir et ouvrir une cave particulière. Son projet a été mûrement réfléchi. Après un bac STAV obtenu en 2010, puis un DUT en Gestion des entreprises et administrations (GEA) décroché en 2012, Thomas a mené sa propre étude de marché. «On avait la possibilité d’acheter des terres en appellation coteaux d’Aix- en-Provence ou côtes-de-Provence, se souvient le jeune agriculteur. L’avantage du côtes-de- Provence, c’est qu’il a plus de renommée internationale. Le vin se vend un peu plus cher et les terres sont moins chères qu’à Aix, où la pression foncière est élevée.» Avec l’installation prochaine de son frère, le jeune agriculteur aimerait agrandir le vignoble familial d’une quinzaine d’hectares. «Ce n’est pas simple, il y a beaucoup de concurrence sur les terres, (…) huit à dix acheteurs potentiels pour un même terrain.» Mais d’abord, il veut ouvrir sa cave particulière avec salle de dégustation pour vendre sa première cuvée de palette en 2020. Le problème ? Le permis de construire se fait attendre… depuis 2015. «J’ai vu le maire ce matin, il m’a dit que c’est en très bonne voie, raconte Thomas. D’ici un an et demi, ça devrait être bon.»

Erreur administrative. À la suite du passage d’un Plan d’occupation des sols (POS) à un Plan local d’urbanisme (PLU), une partie de son exploitation s’est retrouvée en zone naturelle in- constructible. « Aujourd’hui, ils se rendent compte de leur erreur, affirme le jeune exploitant. Ils doivent déclassifier la zone pour ensuite me donner le permis.» En attendant, il ouvrira une cave temporaire dans le bâtiment existant de la fromagerie: «Il faut qu’elle soit prête pour septembre 2019.»

Le reclassement en zone agricole permettrait aussi au Gaec Lou Miss d’agrandir la chèvrerie, elle aussi située en zone naturelle. «L’objectif, à terme, c’est d’avoir un troupeau de 90 chèvres du Rove», indique Thomas. Des chèvres rustiques qui broutent la garrigue sept heures par jour et qu’il aimerait associer davantage à son travail de vigneron.  «Je vais mettre en place un enherbement semé sur mes parcelles pour lutter contre l’érosion, explique Thomas. En février, les chèvres pâtureront entre les vignes pour tondre l’herbe et ainsi éviter le gel.»


Continuer la lecture...