L’agriculture vieillit sur notre continent. En France, la chute démographique agricole est vertigineuse : depuis 2010, près de 100 000 exploitations ont disparu, et aujourd’hui, seulement 12 % des agriculteurs ont moins de 40 ans (source : Agreste). Pendant ce temps, la moyenne d’âge des chefs d’exploitation frôle les 52 ans. Ces chiffres ne sont pas seulement alarmants pour notre secteur, ils sont un signal d’alerte pour l’ensemble du continent. Dans un contexte géopolitique marqué par les tensions militaires, sur les ressources, les crises sanitaires ou les défis climatiques, le renouvellement des générations agricoles n’est plus une option, mais une condition de notre stabilité collective. Une agriculture sans jeunes, c’est une Europe affaiblie, dépendante, vulnérable. À l’inverse, une politique volontariste en faveur de l’installation des jeunes agriculteurs, c’est une condition indispensable de résilience, de souveraineté et de paix sociale.
La stratégie présentée la semaine dernière par la Commission européenne marque une prise de conscience, et nous saluons les annonces du commissaire Christophe Hansen. Mais comment croire en cette ambition quand le budget de la PAC est amputé de 85 milliards d’euros ? Quand la Commission se contente de proposer un doublement de la part des enveloppes nationales dédiées aux jeunes – passant de 3 % à 6 % – sans aucun mécanisme contraignant pour les États membres ? Sans engagement budgétaire solide et sans obligations claires, cette stratégie risque de rester lettre morte. Nous le répétons : il faut consacrer 10 % du budget agricole actuel au renouvellement des générations, et des outils concrets pour faciliter l’installation.
Pour relever ce défi, il nous faut des dirigeants forts et stables, capables de porter une vision de long terme. Nous saluons à cet égard le maintien de la ministre de l’Agriculture, un gage de continuité dans un ministère clé. Mais la stabilité ne suffit pas, il faut aussi de l’audace. Le gouvernement français, tout comme le commissaire européen à l’Agriculture, doivent faire du renouvellement des générations une priorité absolue. Cela passe par des mesures concrètes comme des aides à la production plus structurantes, une politique d’installation plus ambitieuse sur l’anticipation face au dérèglement climatique et aux enjeux de transmission ou un revenu décent garanti pendant les premières années. Dans notre document « Pour une nouvelle Europe agricole », nous proposons des solutions innovantes pour sécuriser les parcours d’installation et attirer de nouveaux talents vers nos métiers.
La France a les moyens d’être un chef de file. Mais pour cela, il faut rompre avec la logique des petits pas et des demi-mesures. Le renouvellement des générations, c’est un projet de société, pas un dossier technique. C’est un choix politique qui engage notre avenir alimentaire, notre capacité à faire face aux crises, et notre place dans le monde. Nous, jeunes agriculteurs, sommes prêts à nous battre pour porter cette vision. Mais nous avons besoin de dirigeants à la hauteur de l’enjeu, qui osent penser le long terme, qui refusent le déclinisme et qui font de l’agriculture une priorité stratégique. Stabilité et force de proposition, voilà ce que nous attendons.
Continuer la lecture...


